« Il y a toujours un abîme entre l’essence des choses et l’idée que nous nous en faisons. »Edmond Thiaudière.
La subjectivité parsème la réalité d’illusions.
Dans notre quotidien nous avons accès facilement à un grand nombre d’informations. La subjectivité découle de l’interprétation que nous faisons de ces informations, qu’elles soient des sensations ou des idées.
Amener plus d’objectivité dans notre façon d’appréhender le monde nous aiderait à développer notre sens critique pour ainsi optimiser nos prises de décisions et élargir notre connaissance.
Nous avons l’impression de penser de façon rationnelle, nous faisons confiance à notre intuition, et nous pensons que nos jugements ou nos décisions ont une base solide et sont issus de notre pleine conscience. En réalité, nous sommes influencés par le fonctionnement automatique de notre cerveau. Celui-ci dispose de deux manières de traiter l’information qui s’opposent :
- le système 1 : est rapide, intuitif, émotionnel, il cherche à économiser l’énergie. Il fonctionne de façon automatique sans que nous ayons conscience de son travail et de son existence (c’est grâce à lui que nous n’avons plus besoin de réfléchir pour marcher, faire du vélo ou compter)
- le système 2 : est lent, réfléchi, logique, calculateur et s’active pour effectuer une tâche cognitive précise demandant un effort mental, il consomme beaucoup d’énergie (c’est lui qui s’active lorsque nous avons appris à conduire, à lire ou encore lorsque nous devons remplir un formulaire administratif…).
Voici un exemple simple pour évaluer leur fonctionnement : à la question « Dans son arche, combien d’animaux de chaque espèce Moïse a-t-il transporté ? », le système 1 serait tenté de chercher un nombre, alors que le système 2 répondrait « aucun, c’est Noé qui a transporté des animaux, pas Moïse. »
(Les énigmes sont idéales pour entraîner notre cerveau à se déshabituer du mode automatique en renforçant un processus de pensée latérale qui soutient le système analytique.)
Le cerveau est préoccupé principalement par le fait d’économiser de l’énergie et de maintenir une image cohérente du monde qui nous entoure. C’est en cela que les automatismes ou comportements réflexes du système 1 sont utiles, ils nous font gagner du temps et préparent nos actions. Aussi efficace soit-il, ce système comporte une faille : les biais cognitifs.
Ces biais sont la limite de ce fonctionnement rapide, ils sont à l’origine d’erreurs de jugement, d’évaluation, de perception. Ce sont des raccourcis mentaux qui peuvent être comparés à des illusions mentales tout comme le sont les illusions d’optiques.
Les biais les plus souvent en cause :
- nous font tenir à nos croyances en confortant ce qui les renforce et en rejetant ce qui les menace,
- nous maintiennent dans l’inertie car ils découragent le changement,
- nous poussent à nous sur-évaluer ou nous sous-évaluer,
- nous incitent à penser et agir comme les autres,
- nous font adhérer à des stéréotypes,
- nous rendent crédules face à la désinformation (les discours simples nous séduisent plus que les théories complexes) …
Les biais cognitifs sont inhérents à la nature humaine. Les identifier, connaître leurs effets sur nos raisonnements et nos choix active notre sens critique. Celui-ci relève d’une vraie volonté d’analyser objectivement de ce que nous percevons. Il demande que nous ayons conscience de nos propres préjugés, que nous soyons prêts à remettre en question nos croyances et nos opinions personnelles, que nous gardions une curiosité qui nous fasse apprécier la complexité des choses.
La subjectivité, en mêlant nos émotions, perceptions, mémoires, idées, préférences, colore notre réalité, témoignant de notre unicité, elle crée la diversité. Cependant, démarrer un nouvel apprentissage, aller vers de nouvelles connaissances et changer d’habitudes demandera de prendre conscience et de se libérer des illusions et des automatismes qu’elle crée.
Sources :
Héloïse De Visscher et Philippe Latinis : « Le sens critique. Et quoi encore ? »
Racky Ka-Sy : « Les biais cognitifs sont-ils (in)évitables ? »
Yann Verdo : « Ces biais cognitifs qui nous gouvernent. »
Mai Thi Nguyen-Kim : « Tout est chimie dans notre vie. »